Les artistes du Parlement


Notre programmation continue de s’écrire avec nos quatre artistes associé·es. Nous avons pensé leur présence comme un dialogue sans cesse renouvelé, une manière d’entrecroiser leurs pensées et leurs écritures puissantes, en prise avec les grandes questions qui chahutent notre société. Iels nous accompagnent pendant trois ans et guident, tour à tour, la construction d’une saison. Celle-ci s’est élaborée avec Agnés Mateus et Quim Tarrida autour d’un Écho du monde intitulé « Déplacer des montagnes », comme un fil rouge liant poétique et politique.

Agnés Mateus et Quim Tarrida

Artistes multidisciplinaires, Agnés Mateus et Quim Tarrida signent de véritables brûlots pop, entre théâtre, performance et cabaret clownesque. Également formée au journalisme, Agnés Mateus cofonde le Col·lectiu General Elèctrica qui, entre 1996 et 2004, agite avec audace la scène barcelonaise. Quim Tarrida manie quant à lui la vidéo, la photographie et l’art sonore, et puise notamment son inspiration dans la BD, les jouets enfantins et la publicité détournée. Héritier·ères de l’émancipation esthétique de la Movida, iels créent des spectacles qui font une critique mordante des violences policières (Hostiando a M), des violences faites aux femmes (Rebota rebota y en tu cara explota) et de la résurgence du fascisme Patatas fritas falsas. C’est autour de ce dernier spectacle, dont la déflagration retentit encore, que nous avons choisi de construire un Écho du monde résolument combatif.

Betty Tchomanga

Betty Tchomanga manie des influences multiples, mélange les rituels vaudous et le hip-hop autotuné, peuplant ses danses de figures obscures et invisibles. Elle mène en parallèle un parcours de chorégraphe et d’interprète métamorphique – on l’a notamment découverte sorcière joueuse chez Nina Santes et bacchante carnavalesque chez Marlene Monteiro Freitas. Entre le solo Mascarades et le quatuor Leçons de ténèbres, elle déploie des corps chantants et pulsants, dangereux parfois, des corps à la transe inquiète, sautant et creusant le sol jusqu’à déterrer des gestes, toute une pensée que la colonisation et l’esclavage n’ont pas réussi à effacer. Avec Histoire(s) Décoloniale(s), elle crée une série de portraits, en salles de classe puis sur scène : tour à tour, Dalila Khatir, Folly Romain Azaman, Emma Tricard et Adélaïde Desseauve aka Mulunesh font résonner des récits et des imaginaires intimes entre le continent africain et l’Occident.

Gurshad Shaheman

Gurshad Shaheman crée un théâtre en quête d’identités et convie le public à des traversées sensorielles, ne craignant ni les larmes ni le charnel. Dans Les Forteresses, il convie sa mère et ses tantes à raconter une fresque familiale, politique et historique de l’Iran (2020). Il pourra toujours dire que c’est pour l’amour du prophète (2018) entremêle les témoignages de réfugié·es LGBT issu·es du Moyen- Orient tandis que Jadis, lorsque mon cœur cassa (2023) croise les récits de personnes en parcours de soins psychiatriques. Ce faisant, Gurshad Shaheman dessine une cartographie de l’intime, à la fois pudique et chatoyante, agençant les récits de vie comme autant de miroirs aux reflets changeants. Avec Sur tes traces (2024), un roadtrip en forme de portraits croisés et amoureux, il inaugurait son Écho du monde dédié à « nos identités performées ». Cette saison, il mettra en scène les étudiant·es du PSBB/ESAD le temps d’un spectacle, Notre ronde (titre provisoire), qui sera répété puis créé au Théâtre de la Bastille.

Tout lieu possède un génie latent dont la manifestation est tributaire d’un révélateur qui le dotera d’une qualité singulière, unique.
  François Méchain, Genius Loci